Fortress

Année: 1993:

Réalisé par: Stuart Gordon

Eh oui, je suis parti en vacances, le blog a donc été abandonné pendant quelques temps. Avec le mauvais temps, le camping a cependant été assez compromis. Et histoire de marquer le coup, je suis de retour avec un petit film plein de défauts mais incontournable: Fortress!

Fortress est signé Stuart Gordon, réalisateur doué dont je reparlerai ici. Connu surtout en tant que scénariste, il a cependant été aux commandes de nombreux films, les plus connus restant Re-Animator et Les Poupées, deux grands classiques du cinéma de genre. Autant le dire tout de suite, Fortress, s'il dispose d'un budget plus important, est loin d'égaler les deux films précités.

Le début est pourtant plutôt encourageant. Dans un futur proche, la population humaine a augmenté trop vite, à tel point que les tous les couples sur Terre sont passés au régime chinois: un seul enfant par femme! C'est alors qu'arrive Christophe Lambert et sa femme. Inutile de dire qu'ils ont fraudé, leur premier enfant étant mort-né. Tous deux arrêtés, ils sont séparés et envoyés dans la prison la plus perfectionnée du monde. On apprécie l'atmosphère assez paranoïaque, digne de la meilleure science-fiction... La scène d'ouverture est l'une des plus réussies, pleine de tension et de suspense, basque certes, mais réussi.

L'insertion de la puce électronique dans le corps des prisonniers, la première scène qui casse l'illusion...

On retrouve ensuite les passages obligés du film carcéral, revisitées à la sauce futuriste! Arrivée dans la prison, discours du directeur... Jusqu'ici tout va bien, et le film reste correct.

Mais une fois les premières minutes passées, les décors de la prison apparaissent... Et c'est là que le bas blesse, car certains décors sont vraiment moches et assez ridicules, tout comme les effets spéciaux, dignes d'une série B de bas étage, ce que devient de plus en plus Fortress au fur et a mesure de la progression de l'histoire.

Les acteurs eux-même semblent ne pas y croire une seconde. Quasiment tous les seconds rôles cabotinent à souhait, preuve que la direction d'acteur n'est pas le point fort de Stuart Gordon, loin de là! Christophe Lambert se contente de faire le strict minimum, tout en restant assez crédible dans un rôle de héros bon et innocent déjà vu et revu tant de fois. Son personnage est sans doute le plus lisse et le moins intéressant du film. Les seconds rôles, même caricaturaux et mal interprétés, ont au moins un certain caractère...

Le meilleur personnage reste Mr Poe, le directeur de la prison, mi-humain mi-robot, interprété par un Kurtwood Smith tout en retenue, à l'opposé de quasiment tout le reste du casting. Pervers, obsédé, limite voyeur, Mr Poe désire plus que tout la femme de notre Totophe national, qu'il emmène vivre avec lui. Heureusement, comme toute héroïne digne, la belle reste toujours amoureuse de son mari.

Entre l'arrivée des prisonniers et ce passage, il s'écoule de longues minutes de scènes de remplissage, ou l'on montre la vie dans la prison, la sécurité ultra-perfectionnée, et autres... Scènes qui auraient pu être passionnantes, mais qui sont finalement inutiles et longuettes. Le film contient beaucoup de bonnes idées: les lignes infranchissables par les prisonniers, la surveillance par caméra perfectionnée, les punitions envers les prisonniers récalcitrants... Mais ces idées sont malheureusement gâchées la plupart du temps, et deviennent des « passages obligés », des clichés que l'on retrouve dans n'importe quelle série B bas de gamme. Dommage, car l'originalité était bien présente. Stuart Gordon, s'il avait été scénariste, aurait sans doute fait autrement...

C'est en effet Gordon qui apporte un peu de qualité au film, grâce à sa réalisation dynamique et assez osée, loin de l'académisme de bon nombre de films d'action-science fiction. On reconnaît d'ailleurs son style, empreint de dérision et de second degré. Quel dommage que le scénario ne lui ait pas été également confié!

On apprécie quand même quelques vrais bons moments, par exemple le combat entre Totophe et un gros costaud de prisonnier sur une plate-forme, l'autorité de la prison procédant à une exécution on ne peut plus sommaire... Mais on apprécie aussi le manque de sérieux des figurants. La scène ou tous les prisonniers sont sensés tomber à terre et simuler la douleur est une petite merveille qui fait vraiment rire, tant certains figurants sont peu doués! On apprécie tout de même l'effort, le scénario fourmillant, encore une fois, de bonnes idées largement sous-exploitées.

Un autre passage intéressant: Christophe Lambert, prisonnier, retrouve sa femme, et décide de se la jouer bad guy, pas du tout crédible. Puis s'ensuit une scène de rêve moche comme tout, l'une des plus dégueulasses qu'il m'ait été donné de voir. Et cela devait être encore pire sur grand écran, à l'époque de la sortie du film!

Enfin, une fois ces mauvais moments passés, arrive enfin l'évasion, qui couvre le dernier tiers du film. Eh oui, avant cela s'écoule une heure de péripéties diverses plus ou moins intéressantes! Enfin, cette évasion tant attendue est techniquement bien faite par rapport au reste; on dirait que la majorité du pognon y est passés: explosions, combats et effets spéciaux! De film carcéral à la sauce science-fiction, Fortress se transforme en pur film de science fiction, avec quelques scènes aussi prévisibles que jouissives, ou Christophe Lambert élimine des tonnes d'ennemis a la mitrailleuse. Certains effets gores sont d'ailleurs assez osés et plutôt bien foutus. S'ensuit une happy-end vite emballée et décevante, et hop, fin! Ben oui, vous vous attendiez à quoi?

Aller, je suis bien méchant. Certes, Fortress est bourré de défauts, caricatural a souhait, grossièrement fait, mais il se laisse regarder, avec un peu d'indulgence. On reste quand même dans un film d'honorable facture, un divertissement agréable à défaut d'être de qualité. Il est cependant dommage que Fortress ne reste qu'une série B juste regardable, alors que ce projet avait tout pour être un film plus ambitieux, avec de bonnes idées et un pitch original. La preuve qu'en 1993, Christophe Lambert n'était déjà plus un acteur bankable...